SpaceX, Elon Musk et Starship : conquête de Mars ou révolution militaire ?

Le programme Starship a pour objectif déclaré de rendre l’humanité multiplanétaire en permettant la colonisation de Mars. Cependant, il suscite également un intérêt majeur de la part de l’armée américaine pour des applications de transport rapide de matériel militaire autour du globe. Le développement de Starship semble pour l’instant davantage orienté vers la satisfaction de besoins stratégiques terrestres, notamment militaires, en raison des défis techniques majeurs restant à surmonter pour atteindre Mars.

Elon Musk a exprimé le souhait de lancer une mission Starship sans équipage vers Mars dès 2026. Ce calendrier coïnciderait avec une période où la Terre et Mars seront plus proches, facilitant le voyage. Cependant, cet objectif est confronté à des défis techniques importants.

Le défi le plus important pour une mission martienne avec Starship est le ravitaillement en orbite terrestre. Starship ne peut pas emporter suffisamment de carburant pour le voyage vers Mars en un seul lancement et nécessite d’être ravitaillé en orbite par plusieurs vols de Starship-citernes. Le transfert de propergol cryogénique (méthane et oxygène liquides à très basse température) à grande échelle dans le vide spatial est une technologie complexe, inédite et non encore maîtrisée à l’échelle nécessaire. Tant que ce verrou technologique n’est pas levé, les missions martiennes restent théoriques malgré les progrès sur d’autres aspects du programme.

L’armée américaine est fortement intéressée par le concept de « point-to-point » utilisant Starship. Il s’agirait de transporter rapidement du matériel militaire, voire des troupes, vers n’importe quel endroit sur Terre en moins d’une heure. Ce concept, révolutionnaire pour la logistique militaire, a déjà donné lieu à des contrats importants avec SpaceX et à la construction d’infrastructures spécifiques par l’armée pour accueillir ces missions. Le projet « Starfall » est explicitement lié à cet effort de transport militaire rapide.

L’armée américaine est fortement intéressée par l’utilisation de Starship pour le concept de « point-to-point », c’est-à-dire le transport rapide de matériel militaire vers n’importe quel endroit sur Terre en moins d’une heure. SpaceX a déjà obtenu des contrats pour développer Starship dans ce but et l’armée construit des infrastructures pour accueillir ces missions.

« Starfall » est un projet lié à Starship qui est explicitement associé à l’effort militaire américain visant à utiliser le véhicule pour le transport rapide de matériel militaire à l’échelle mondiale.

Oui, la réalité industrielle et contractuelle suggère que les applications militaires, particulièrement le transport point-à-point, sont techniquement plus accessibles à court terme que les missions martiennes. Elles bénéficient déjà d’investissements militaires significatifs et d’infrastructures dédiées. Bien que Mars demeure l’objectif ultime affiché par SpaceX, les besoins stratégiques terrestres et les contrats militaires constituent actuellement un moteur de développement plus immédiat pour Starship.

Starship a connu des échecs lors de récents tests en vol, se terminant par des explosions. Ces incidents ont perturbé le trafic aérien et ont montré les défis techniques persistants. Bien que SpaceX continue de tester et d’apporter des modifications, ces revers soulignent la nature expérimentale du véhicule et le chemin restant à parcourir.

Même si le ravitaillement en orbite est crucial pour les missions interplanétaires comme celles vers Mars, il pourrait également être pertinent pour d’autres applications de Starship nécessitant une capacité de charge utile plus importante en orbite terrestre.

Les entreprises d’Elon Musk, notamment SpaceX, ont reçu et continuent de recevoir des financements gouvernementaux considérables. Cela inclut des subventions, des crédits d’impôt, mais surtout des contrats gouvernementaux très lucratifs avec des entités comme la NASA et le Pentagone. SpaceX a reçu plus de 15 milliards de dollars au cours des quinze dernières années, principalement de ces deux agences. Ces financements sont essentiels pour le développement et les opérations de SpaceX.

Oui, les les entreprises d’Elon Musk, en particulier SpaceX, ont reçu et continuent de recevoir des montants considérables de financement de la part du gouvernement américain. Cela prend la forme de subventions directes, de crédits d’impôt, mais surtout de contrats gouvernementaux lucratifs avec des entités comme la NASA et le Pentagone. Une enquête du Los Angeles Times en 2015 estimait déjà à 4,9 milliards de dollars l’aide reçue par Tesla, SpaceX et SolarCity, et ce chiffre a depuis considérablement augmenté, atteignant au moins 38 milliards de dollars en contrats, prêts, subventions et crédits d’impôt combinés selon un rapport de février 2025. SpaceX à elle seule a reçu plus de 15 milliards de dollars au cours des quinze dernières années, principalement de la NASA et du ministère de la Défense.

La relation a évolué d’une forme de soutien initial pour aider l’entreprise à se développer (notamment pour réduire la dépendance aux lanceurs russes pour le transport vers l’ISS) à une dépendance stratégique croissante du gouvernement américain envers SpaceX. SpaceX est passé d’un simple prestataire de services de lancement à un partenaire quasi exclusif pour des programmes militaires et classifiés. Le gouvernement américain s’appuie de plus en plus sur les capacités technologiques et l’efficacité de SpaceX, notamment pour le lancement de satellites stratégiques et la gestion de projets sensibles comme Starshield. Cette dépendance est telle qu’elle soulève des préoccupations quant à une situation de monopole et à l’influence d’un acteur privé sur la sécurité nationale.

SpaceX joue un rôle crucial dans les programmes de sécurité nationale américains. L’entreprise développe et lance des satellites espions, gère des projets classifiés secret défense, et a reçu des contrats majeurs dans le cadre du programme National Security Space Launch (NSSL). Sa technologie de lanceurs réutilisables et ses coûts compétitifs l’ont positionnée comme un acteur incontournable pour la défense américaine. De plus, la division militaire de SpaceX, Starshield, basée sur le réseau Starlink, est conçue pour fournir une connectivité sécurisée et rapide au gouvernement et aux forces armées, et est envisagée pour une intégration profonde dans l’architecture spatiale militaire américaine, y compris pour le renseignement et les communications tactiques.

La dépendance croissante du gouvernement américain envers SpaceX suscite plusieurs préoccupations majeures. La principale est le risque d’une situation de monopole, où un acteur privé détiendrait un contrôle excessif sur des capacités stratégiques essentielles. Des responsables politiques et militaires ont exprimé leurs inquiétudes quant à la possibilité que SpaceX interrompe ses services « au gré de M. Musk », soulignant la vulnérabilité induite par cette dépendance. Le contrôle direct exercé par Elon Musk sur les opérations de SpaceX, sa capacité à prendre des décisions unilatérales, et ses positions controversées (notamment vis-à-vis du conflit en Ukraine et de la Chine) limitent la marge de manœuvre de Washington face à une entreprise devenue vitale pour ses intérêts.

L’objectif officiellement promu pour Starship est la colonisation de Mars. Cependant, pour l’instant, le développement de Starship répond davantage à des besoins stratégiques terrestres, en particulier pour le transport militaire rapide point-à-point. L’idée est d’utiliser Starship pour livrer des quantités importantes de matériel militaire ou des troupes n’importe où sur la planète en environ une heure, une capacité qui révolutionnerait la logistique militaire. Des projets spécifiques comme « Starfall » sont explicitement liés à cet effort militaire, et l’armée américaine investit déjà dans des infrastructures pour accueillir ces missions. L’obstacle majeur pour les missions martiennes avec Starship reste le ravitaillement en orbite, une étape technologique complexe et inédite qui n’est pas encore résolue. Le transport militaire point-à-point est techniquement plus accessible et bénéficie d’un soutien militaire important, ce qui en fait un moteur de développement plus immédiat pour Starship que l’objectif martien à court terme.

SpaceX a bouleversé le marché des lancements militaires, traditionnellement dominé par des acteurs comme United Launch Alliance (ULA, une coentreprise de Boeing et Lockheed Martin). Grâce à ses lanceurs réutilisables, SpaceX propose des coûts inférieurs et une plus grande fiabilité. Dans le cadre du programme National Security Space Launch (NSSL), SpaceX a progressivement augmenté sa part de marché. Dans la Phase 2 (2022-2027), SpaceX a remporté 40% des missions, tandis qu’ULA en a obtenu 60%. Cependant, dans la Phase 3 (2027-2032), SpaceX a obtenu une part majoritaire des fonds alloués (43%), dépassant ULA qui est tombée à moins de 40%. Blue Origin fait une percée significative avec 18% des fonds alloués dans la Phase 3, bien que son lanceur New Glenn ne soit pas encore pleinement opérationnel. La domination de SpaceX fragilise les anciens leaders industriels et pousse le Pentagone à diversifier ses fournisseurs malgré la position dominante de SpaceX.

SpaceX a profondément bouleversé le marché des lancements militaires, traditionnellement dominé par des acteurs comme United Launch Alliance (ULA). Grâce à ses lanceurs réutilisables, SpaceX a pu proposer des coûts inférieurs et une plus grande efficacité. Cela lui a permis de gagner des parts de marché significatives dans le cadre du programme NSSL, devenant le leader dans la Phase 3 (2027-2032) avec une part majoritaire des fonds alloués. Cette position dominante a fragilisé les anciens acteurs et incite le Pentagone à chercher une diversification de ses fournisseurs malgré le leadership de SpaceX.